Texte écrit par Thibault Bissirier à l’occasion de l’exposition Détours à la Galerie Isabelle Gounod
Septembre 2020
Détour : nom masculin
XIIe siècle, destor, « endroit écarté, caché »
1. Tracé, trajet, itinéraire qui s’écarte de la ligne droite, du chemin direct.
2. Endroit où un chemin change de direction.
3. Moyen adroit, ruse, subtilité pour éluder quelque chose, pour venir à bout de ce qu’on veut faire. Plus spécialement : Précaution de langage qui fait que l’on s’exprime indirectement.
La Galerie Isabelle Gounod est heureuse de présenter « Détours », le nouvel accrochage consacré aux récents dessins d’Audrey Matt Aubert, au Studio de la galerie.
Erigés au milieu de larges espaces ouverts, décors diurnes ou nocturnes, les étranges assemblages d’Audrey Matt Aubert apparaissent comme des stations ludiques et poétiques, des attractions facétieuses pour un Luna Park halluciné.
Ici encore, l’artiste emprunte ses motifs à divers corpus, depuis la peinture italienne du 15ème siècle (notamment Francesco del Cossa) jusqu’aux sculptures modernistes, en passant par les gravures d’encyclopédies dont elle reprend le vocabulaire graphique méticuleux : hachures nettes, dégradés poudreux et lignes claires.
Par la répétition et l’agrégation de ces formes simples (sphères, rubans, éléments de construction, etc), mais également par leur détournement, leur dé-contextualisation et leur hybridation, Audrey Matt Aubert les réduit en des modules amovibles à l’envi. Des figures égarées dont la compréhension se retrouve bouleversée suivant un double effet d’anachronisme spatial et temporel.
La présence du texte et l’ambiguïté des titres, dévoilent quant à elles l’attachement de l’artiste à la poésie et aux images qu’elle véhicule. Loin de simplement illustrer un rapport direct avec lui, les dessins imposent au contraire une relation de complémentarité avec les extraits et citations qui, parfois, les accompagnent. Une forme de fantaisie subtile qui, en éludant le sujet qu’elle se donne, en vient à bout d’une manière détournée, par associations et carambolages. S’en dégage une sagesse malicieuse, propre à aiguiller l’imagination et à en accueillir les détours.
Thibault Bissirier